Monolithe industriel froid, brutal et déshumanisant. Streetcleaner est aussi horrible qu'un abattoir fournissant du McDonald's, qu'un chiot trainé derrière une voiture, une lapidation sur une place publique ou des préliminaires avec Mireille Mathieu. "Like Rats" ; "Christbait Rising" ; "Head Dirt" ; "Tiny Tears"... Ce disque va encore plus loin que de représenter le style metal/indus; il le salit à tout va, le souille d'une violence en putréfaction avec ses riffs lobotomisants, ses larsens nauséeux et ses séquences martiales. Broadrick éructe son timbre guttural tel un chef rassemblant ses guerriers pour le sacrifice, celui d'une musique mise rudement à l'épreuve. Gore, et génial !
Pierre angulaire du post-hardcore à l'aube d'un nouveau siècle, cette première production d'Albini qui intervient après le monumental Through Silver In Blood reste incontestablement un moment de grâce. On y trouve cette thématique constante où l'homme et la nature sont livrés à leur propre déchéance. Une théorie récurrente dont la puissance organique est une fois de plus à son chevet, de par ces assauts de fureur pachydermique (The Doorway ; Under The Surface ; Times Of Grace), ces ambiances orageuses (Suspended In Light ; Belief ; Away) et ces ballades funèbres (Descent ; The Road To Sovereignty). L'instant est intense, l'horizon des plus sombres. Voilà un album inébranlable qui porte on ne peut mieux son nom.
Justin Broadrick ne croyait pas si bien dire en affirmant
que Jesu constituait la réponse féminine à Godflesh. Sur le fond, le lien est
évident avec ces séquences rythmiques programmées pour labourer une lourdeur
metal/indus percutante. La forme, quant à elle, se démarque pour son ambiance
éthérée, au chant clair et mélodique, avec ces envolées shoegaze tout droit sorties
du style Ride ou My Bloody Valentine (influences que personne n’objectera). Cet EP Silver constitue la meilleure approche
du nouveau projet Broadrick, d’abord déconcertant, ensuite attachant. Ne
cherchons pas la hargne dans cette œuvre aérienne emplie de quiétude et d’héroïsme.
Ce disque a été fuit comme la peste par les médias, les fans, Geffen et le groupe lui-même. Un peu trop cheap pour les uns, trop électro pour d'autres, l'aspect sur-travaillé et très plissé du son semble être surtout à l'origine du dégoût général. Ma foi, que chacun s'en tienne, il est vrai que Girls Against Boys n'est ici pas à son meilleur, la noise des débuts s'est égarée, mais le disco-rock-groovy psyché et distorsioné de Freak On Ica contient du potentiel. Dès l'assaut donné sur Park Avenue, les riffs post-punk balancent et serpentent sur l'efficace paire de basses ronronnantes, il en de même pour Speedway ou Vogue Thing qui prennent fiévreusement à la gorge. La voix crooner de Scott McCloud sait toujours se faire aussi envoûtante et la rythmique syncopée bastonne à tout-va. Mais ce que les New-Yorkais n'avaient jamais tenté auparavant, c'est ce penchant new-wave où les synthés et les scratches interviennent là où ça fait du bien (mal pour d'autres): Pleasurized ; Black Hole ; Push The Fader... Les risques et périls d'une nouvelle exploration sonique.
"Nous sommes là pour faire danser les gens. Changer le cours de la planète n'a jamais été un but ou même un rêve pour Prodigy" disait en bon couillon Liam Howlett dès 94. Le cerveau créateur s'est alors mis le doigt dans l’œil jusqu'au coude en accouchant, avec ses deux vedettes street/punk Keith Flint et Max Reality, de la plus grande bombe électro jamais connu, constituant une issue de secours à une double décennie ravagée par la sacro-sainte merde Eurodance. Car ici, pas besoin d'être un Raver effronté pour prendre plaisir à booster les basses fréquences et faire résonner les beats du hip-hop abrasif Diesel Power, du techno-rock Serial Thriller, ou des populaires Smack My Bitch Up, Breathe et Firestarter. Les manœuvres hybrides percutent avec une cadence infernale et les hommages contemporains sont nombreux (sample des Breeders sur Firestarter ; des Beastie Boys sur Funky Shit ; reprise du Fuel My Fire de L7...). L’Angleterre a une fois de plus déminé la situation.
Fort de ce premier album paru un an après les EP Slickleg et Lifesblood, ces quatre sudistes d'Atlanta font déjà preuve d'une force de composition éclatante dans la case artistique "metal moderne", entre sludge breaké (Crusher Destroyer ; March Of The Fire Ants ; Burning Man ; Mother Puncher...) et progressions mystiques (Ole' Nessie ; Trainwreck ; Elephant Man). Il est indispensable pour ceux qui aiment le heavy aventureux et hypnotique de haute technicité - roulements de batt' surdoués, contre-temps haletants et solos de guitare sophistiqués - de se pencher là-dessus, avec en guise d'emballage un artwork bien soigné.
Accouché dans la douleur et imprégné d'une force post-punk où l'expérimentation règne en maître sur une atmosphère hostile, The Horse, The Rat And The Swan amène Snowman à délaisser l'Australie pour le vieux continent en installant ses quartiers dans la grisaille londonienne. Une grisaille qui culmine en fil rouge sur cet album brumeux, énigmatique, perturbant et proche du chaos, ponctué d'explosions tribales lorsque la batterie entre en jeu, que les voix s'écorchent et que les guitares, tantôt désertiques, tantôt shoegaze, fusionnent aux délires barrés des cuivres (saxo et clarinette en amont). Bel exemple de dandysme sombre immaculé du sang des Swans et de Birthday Party. N'oublions pas ces chirurgiens de l'apocalypse.
"Baiser ta mère, c’est un sale boulot, mais il faut bien que quelqu’un le fasse".
A la confluence des Cramps, Iggy Pop, et Joy Division, les bouddhistes allumés de Eighties Matchbox sont arrivés comme des merdeux sans pitié dans une industrie musicale occupée à branler les nouilles des Strokes, Bravery et autres Libertines. Avec leur allure de gothiques grand-guignolesques ravagée par des excès distingués (bastonnades et jets de vomi sur scène...), ces Anglais mal-aimés ont traumatisé par leur punk-garage psychobilly au swing sexuel prononcé, entre puanteur horrifique et groove désertique. Horse Of The Dog est un édifice déjanté où lesfous furieux Celebrate Your Mother ; Chicken ; Whack Of Shit ; Psychosis Safari ; Fishfingers vous donneront l'envie de vous gaver de pilules devant un film d'horreur de série Z.
La contre-culture hippie a eu beau se terminé en déclin, les objets de valeur ont subsisté. Quoi de plus emblématique que ce Surrealistic Pillow pour synthétiser l'essence même du Summer of Love de 1967: Psyché', camé, émancipé, fraternel, optimiste et candide. Rien de méchant ici, juste un bon acid-rock symbole d'amour libre et de défonce en communauté, un folk sous psychotropes où l'influence de la musique nègre du delta se fait ressentir dans des compositions aussi niaises qu'excellentes. Du flower-power à l'extrême, impulsé par la sulfureuse Grace Slick dont la voix atteint des sommets sur les mythiques Somebody To Love et White Rabbit... Faut-il encore présenter ?
Sorti le 23 octobre 2012 sur Rhymesayers Entertainment
Contre-pied urgent dans le milieu rap pour ce multi-instrumentiste qu'est Stefon Alexander. L'anarcho-punk distribue ses coups et provoque la collision dans ce crachas alternatif non-conformistequi remet le style à niveau. We Don't Even Live Here est une scène de crime qui va laisser à coup sure quelques douilles dans les esprits et les dogmes: politique, société de consommation, influence des grandes marques... . Musicalement, le flow incisif du MC retentit sur les claviers, scratches, guitares et la percussion appuie la répercussion des textes avec ces beats électro doublés de prises batteries live. Et comme il faut que ce soit parfait, invitez à la bringue Justin Vernon de Bon Iver, Sims, Astronautalis, Mitclan et Isaac Gale des Marijuana Deathsquads pour façonner un peu plus l'image d'un disque déjà bien admirable.
Electric Worry, un nom évocateur où l’on pige que le trio
aime Clutch. Puis on insère la galette, et l’on comprend vraiment que les trois
jeunes Comtois adorent la bande à Neil Fallon. Ah putain de merde ! Ca te
monte à la gorge…et alors qu’on pense de nouveau avoir la nausée d’un énième groupe
français cherchant la reconnaissance en s’inventant des origines Dixies, c’est
plutôt l’adrénaline qui prend et la banane qui s’affiche sur ta gueule à
l’écoute de ce Back To Motor City. Des
bars enfumés, des bagnoles, du rock’n’roll… Le message est clair,
l’univers est pas nouveau mais les trois gaillards bavent avec conviction ce
que le heavy-metal a donné de plus groovy dans son Histoire, à savoir un bon
gros stoner-rock qui fait bouger le ptit cul de ta poulette, des riffs
puissance 70’s imparables et une rythmique parée à te décrotter les santiags,
sans oublier ce bon chant de routier chaleureux ! Puis comment ne pas
favoriser l’excitant One Vision,
où l’assaut sonore est aussi massif et souple que du Zeke. Alors procurez-vous
ce 4 titres et allez donc voir les gaillards sur les planches, qui sont loin d’être
une bande de sales poseurs.
Explosif et jouissif ! Ils ont gagné leurs galons à descendre Beale Street.
Quand "Salvation" évoque le concept de surveillance dépeint par George Orwell; "Vertikal" , emprunte quant à lui à la verticalité du magma cinématographique "Metropolis". Le guitariste Johannes Person explique dans une interview avoir voulu conceptualiser cet album autour de l’expressionnisme allemand, fasciné qu'il est par la douleur rectiligne des nombreux buildings qui tendent à s'imposer dans le paysage. Ce futurisme, cette noirceur, transparait dans chaque note. L'usinage de riff démentiel et la voix acérée martèle un talent déjà connu des suédois. L'évolution provient plutôt des diverses touches électroniques qui propulsent le groupe vers un esprit dark/ambiant absolument tentaculaire (la 11èmes minutes de Vicarious Redemption, sincérement qui s'y attendait?). Le constat est sans appel, CoL n'a jamais tant sonné dans l'ère du temps, et ce malgré un enlisement du genre. Isis est out (RIP), Neurosis s'est cassé les dents, Pelican nous ressert la même came: il n'y a bien que Cult Of Luna qui peut se vanter d'avoir tenu
tête en 2013.
NOTE: Cult of Luna sera en concert à la Poudrière de Belfort le dimanche 21 avril avec les Aside From A Day et The Ocean.
Dernier album du groupe avant de jeter l'éponge en 1999, Aftertaste est considéré comme le plus commercial de la discographie d'Helmet et se retrouve sous le feu des critiques par certains "Die-hard fans". Ok c'est le plus mélodique mais en quoi Page Hamilton et ses sbires perdent-ils la puissance d'attaque bien compacte qui a toujours définit leur son ? D'autant plus que c'est quand même foutrement bien inspiré (Pure ; Crisis King ; Exactly What You Wanted...) et cette mélodicité nouvellement acquise se révèle un atout non-négligeable (Driving Nowhere ; Broadcast Emotion ; Like I Care...). Alors pourquoi ne pas céder à la facilité harmonique quand elle peut rendre service ?